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Le futur du design graphique: l’intelligence artificielle au service des graphistes (2023)

Qui n’a pas entendu parler de ChatGPT? En novembre dernier, la nouvelle version du robot conversationnel a été lancée et depuis, ces exploits font la manchette. Si on peut résumer ses prouesses à celle d’un assistant personnel ultra-performant (recherche, synthèse, idéation,…), qu’en est-il des outils de création de visuels?

L’intelligence artificielle en communication graphique: portrait de la situation en 2023

En 2019, j’écrivais que l’intelligence artificielle n’était pas une menace pour notre industrie, mais bien une opportunité de créer différemment et plus efficacement pour les graphistes. Les premières fonctions permettaient d’automatiser certaines tâches, et surtout de comprendre le contenu avec lequel le logiciel interagit. Quatre ans plus tard, ces mêmes outils ont évolué et permettent maintenant de créer du contenu à partir d’une requête textuelle. En 2023, il y a de plus en plus de plateformes disponibles.  Au‑delà du mot-clé «intelligence artificielle» utilisé par tous ces logiciels pour décrire une fonction «magique» ou «automatique», certaines plateformes se démarquent. 

DALL-E et Midjourney sont parmi les premières plateformes capables de concevoir des visuels à partir d’une idée écrite par un utilisateur. Elles sont probablement les plus performantes et sophistiquées, mais l’interface est complexe pour un néophyte. Malgré leurs impressionnantes capacités, ces projets sont toujours en cours de développement. Il sera intéressant de découvrir les applications futures de ces outils.

À l’opposé, Canva AI est vraisemblablement la solution la plus adaptée pour une utilisation immédiate. Basées sur la popularité grandissante de ce logiciel de création destiné au grand public, les nouvelles fonctionnalités de création d’images sont d’une simplicité remarquable et vont plaire à tous les graphistes amateurs. Avec ces millions d’utilisateurs, la plateforme désire poursuivre sa percée dans l’industrie en facilitant davantage le processus créatif.

Diverses solutions en ligne permettent aussi la conception de logos (GraphicSprings, Hatchful, LogoAI,…). Sans être révolutionnaires, elles combinent des bases de données existantes de pictogramme et typographie pour créer rapidement un logo simple, moderne, générique et souvent au premier degré (ex.: une pizza pour un logo de pizzéria).

À ce jour, peu d’options sont intéressantes pour de la mise en page. Cependant, l’outil Copilot dans Microsoft Office 365 pourra très bientôt créer un document PowerPoint à partir de données fournies. Une approche similaire pourrait ainsi être utilisée dans le futur pour réaliser une mise en page complète. Même si Microsoft est peu présent en communications graphiques, avec tout l’argent investi par ce dernier en intelligence artificielle (notamment avec Bing), il sera assurément un acteur important dans nos vies.

Adobe et l’intelligence artificielle

Chez les graphistes professionnels, c’est la suite de logiciels Adobe qui domine encore le marché. Depuis 2016, la technologie Adobe Sensei est intégrée à divers outils de sa suite. Pour ceux et celles qui comme moi, raffolent des démonstrations Adobe Max Sneaks lors de leur grande messe annuelle, nous retrouvons de plus en plus de ces démonstrations passées dans les versions actuelles. Les fonctions de remplacement de ciel dans Photoshop, la manipulation de vecteurs entrelacés dans Illustrator et l’ajout de styles automatiques dans InDesign en sont quelques exemples. Plus récemment, la démonstration d’une mise en forme automatique d’une bibliographie dans une mise en page a fait rêver tous les infographistes en édition! (gras, italiques, majuscules, URL,…) Et que dire de la possibilité de créer instantanément de nouvelles photos dans une banque d’images à partir d’une requête et d’une image de référence…

Adobe a remplacé son logiciel de création de visuels pour les médias sociaux Adobe Spark par Adobe Express en 2023. En plus d’ajouter plusieurs fonctions, le principal intérêt, selon moi, est la combinaison de gabarits à une bibliothèque de marque définie par l’utilisateur. En quelques clics, il est donc possible de créer un visuel à partir d’un gabarit aux couleurs, à la typographie et au style de la marque. Dans un futur très proche, on peut facilement imaginer la création d’un nouveau document qui respecte les guides de normes graphiques de l’entreprise à partir uniquement du contenu.

La plateforme en ligne Adobe Firefly est de loin ce qui est le plus prometteur pour les graphistes de demain. Vous n’avez qu’à voir la vidéo ci-haut pour vous convaincre. Actuellement sous forme bêta, les premiers outils sont bien faits, et l’intégration future à la suite Adobe permettra une grande adoption dans le milieu. Nos premières expériences avec Adobe Firefly ne font qu’amplifier nos attentes et notre intérêt pour leurs prochaines mises à jour. Et oui, l’image ornant cet article a été créée par Adobe Firefly à partir d’une requête textuelle et l’ajustement de paramètres(!)

L’histoire moderne nous a enseigné que pour dominer un marché, il faut énormément de ressources financières, matérielles et humaines. Lorsque 2 géants des technologies créent un partenariat, comme Adobe vient de le faire avec Google (intégration à Google Bard), ils s’assurent donc de rester à l’avant‑garde de la technologie pour plusieurs années.

La créativité et l’intelligence artificielle

Les premiers outils de graphisme en intelligence artificielle permettaient d’ajuster automatiquement une image (ex.: baguette magique pour une retouche photo instantanée). Puis, certaines opérations répétitives et laborieuses ont pu être automatisées grâce à la technologie. Plus récemment, les logiciels ont commencé à comprendre les visuels et le contenu que nous manipulons. 

La dernière frontière vient d’être franchie avec la création d’un visuel à partir d’une idée. Les premiers résultats sont variables. Parfois impressionnant, quelques fois loufoque, ce sont souvent des points de départ nécessitant un travail de graphiste pour obtenir une image utilisable dans un contexte commercial réel. L’intelligence artificielle devient donc un outil pour le graphiste, et non le graphiste lui‑même.

L’intelligence artificielle devient donc un outil pour le graphiste, et non le graphiste lui-même.

Les premières conclusions suite à l’utilisation de robot conversationnel, dont le rendement aujourd’hui est largement supérieur à leur équivalent en création d’images, démontrent que les résultats obtenus sont globalement factuels et exacts. Puisque le résultat provient d’une multitude de sources et de l’interprétation de celles-ci, la résultante est généralement le consensus sur le sujet. Sans être révolutionnaire, c’est donc conforme à nos attentes.

Si les technologies de création d’images suivent la même courbe de croissance que leurs équivalents conversationnels, les images ainsi créées vont plaire à la majorité sans toutefois être très extravagantes ou avant-gardistes puisque les sources seront la moyenne de ce qui se crée actuellement. On peut imaginer en 2050 un monde utopique où le design graphique serait très similaire à 2023 et encore plus homogène si 100% des visuels sont faits uniquement par intelligence artificielle. Cette dystopie illustre l’importance d’une intervention humaine pour innover et faire évoluer le design.

Plusieurs questions concernant les droits d’auteurs et la propriété intellectuelle restent actuellement sans réponse face à cette nouvelle réalité. Qui est le créateur de l’image? Peut-on protéger une image créée par une machine? Et si des sources protégées par des droits d’auteurs ont été utilisées, qu’en est-il du résultat final?

Le rôle du graphiste de demain

Au 19e siècle, suite à l’invention de la photographie, certains prédisaient la fin de l’art. 200 ans plus tard, il se vend encore des toiles de peinture… et avoir un appareil photo dans nos poches ne fait pas de nous un photographe professionnel!

Certes, il y a moins de peintres ou de photographes professionnels, et il y aura probablement moins de graphistes dans le futur, mais il ne faut pas confondre le simple fait de posséder les outils avec les compétences requises en communication pour être un bon graphiste. Dans certaines situations, ces solutions automatiques vont combler le besoin du client, mais de façon plus concrète, ce seront des outils à la disposition de graphistes professionnels pour faciliter la création de visuels. Les délais de production seront réduits considérablement grâce à cette technologie.

L’intelligence artificielle en communication graphique est une évolution normale d’un métier basé sur la technologie. De la même manière qu’on ne fait plus des tableaux avec des tabulations dans QuarkXPress lors de la mise en page d’un rapport annuel, on ne balisera probablement plus manuellement les PDFs à rendre accessible dans un futur très proche grâce à l’intelligence artificielle.

En communication, on s’adresse à des humains. Même si la machine nous comprend de plus en plus, et va nous faciliter grandement la vie, qui de mieux qu’un humain pour communiquer à un autre humain?

Psst…

C’est déjà notre 2e article sur ce sujet, et assurément pas le dernier. Inscrivez-vous à notre infolettre ci-dessous pour ne pas manquer les prochaines mises à jour…

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